Cession de créance commerciale et droit de retrait

Tout comme les effets de la signification sur lesquels je suis revenu récemment, le droit de retrait est particulièrement mal compris des plaideurs.
L’article 1699 du Code Civil pose pour principe que

« Celui contre lequel on a cédé un droit litigieux peut s’en faire tenir quitte par le cessionnaire, en lui remboursant le prix réel de la cession avec les frais et loyaux coûts, et avec les intérêts à compter du jour où le cessionnaire a payé le prix de la cession à lui faite. »

Le débiteur peut donc se libérer de la dette litigieuse en remboursant à l’acquéreur le coût supporté pour l’acquisition de la créance.

Reste à préciser ce qu’est un droit litigieux.

L’article 1700 du Code Civil précise :

« La chose est censée litigieuse dès qu’il y a procès et contestation sur le fond du droit. »

Le droit de retrait n’est donc ouvert qu’aux seuls créanciers ayant contesté en justice le fondement de la demande formée contre eux.

Il est de jurisprudence établie que c’est au jour de la cession que le caractère litigieux de la créance s’apprécie.

CA Versailles 12ème ch. Sect. 1 – 17 févr. 2005 RG : 04/04120

CA Paris pole 5 Ch. 6 – 1er juillet 2010 RG : 08/05389

Il est donc parfaitement inopérant d’invoquer le droit de retrait dès lors que l’assignation émane du cessionnaire.

La communication du prix de cession de la créance n’est pas nécessaire.

CA Paris 14ème ch. B 17 octobre 2008 RG : 08/02513

Le mail constitue-t-il une preuve?

A la suite d’un arrêt de la Cour de Cassation (Chambre Sociale 25 sept. n°11-25.884), la force probante du courrier électronique se trouve clarifiée. C’est une question importante pour Carnot Investissement dès lors que le rachat de créances commerciales n’a de sens que si le droit cédé peut être établi.

La Cour fait la distinction entre le cas où la preuve est libre et celui où celle-ci doit être rapportée par écrit. Dans le second cas, il doit être satisfait aux exigences des articles 1316-1 et 1316-4 du Code civil. La preuve par écrit impose la signature électronique et la sauvegarde sécurisée.

En revanche, la liberté de la preuve confère au juge le pouvoir d’apprécier le caractère probant des pièces qui lui sont produites.

En matière commerciale, la preuve est libre (Art. L.110-3 du Code de Commerce). La Cour d’Appel de Bourges vient encore de le rappeler dans une espèce ou Carnot Investissement avait acquis une créance commerciale résultant d’un prêt dont le contrat faisait défaut.

Les mails ne sont donc pas à écarter des pièces à transmettre dans le cadre d’une opération de cession de créances commerciales impayées.

Art 1153 du Code Civil versus art L.441-6 du Code de Commerce

Pour l’année 2014, le taux de l’intérêt légal est attendu au niveau de celui de 2013 soit 0,04 %. Autant dire qu’il ne compensera pas le recours au financement bancaire rendu indispensable par le défaut d’encaissement de factures demeurées impayées à leur échéance.

Pour ceux qui ont prévu des pénalités de retard de 3 fois le taux légal, le calcul prête à rire.

Il paraît souhaitable de modifier les conditions générales de vente en faveur du taux prévu par défaut à l’article L.441-6 du Code de Commerce.

Rappelons que ce texte, qualifié d’ordre public par un arrêt de la Cour de Cassation (Ch. Com.3 mars 2009 n° 07-16.527) stipule un intérêt basé sur le taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points soit actuellement 10,25 %.

Les juridictions commerciales en font dorénavant l’allocation pour peu qu’il soit solicité ce qui reste paradoxalement assez exceptionnel.

Même si le taux légal est majoré de 5 points 2 mois après que la décision soit devenue exécutoire (art L.313-3 du Code Monétaire et Financier) , il reste de moitié inférieur au taux qu’autorise l’article L.441-6 du Code de Commerce. Encore faut-il que les Conditions Générales de Vente ne prévoient pas un taux inférieur ! Un comble car le taux contractuel n’est pas majoré de 5 points.

On peut donc synthétiser la situation ainsi:

Taux légal : 0,04 % à la mise en demeure puis 5,04% 2 mois après la signification de la condamnation exécutoire.

Taux contractuel: 0,14% à l’échéance de la facture sans majoration.

Application de l’article L.441-6 du Code de Commerce sans Taux contractuel: 10,25 % à l’échéance de la facture.

Chacun conviendra qu’il n’est pourtant guères de cadeaux à faire en la matière.

La cession d’une créance sur une entreprise radiée du RCS

CARNOT INVESTISSEMENT rachète certaines créances sur des sociétés radiées du registre du commerce et des sociétés alors que l’adminstration les passe en non-valeur.

Qui a raison ?

Le droit de créance est-il éteint ?

De plus en plus de dirigeants pensent se soustraire à leurs obligations en obtenant la radiation de l’entreprise dont ils ont la responsabilité. Le pari peut être payant mais n’est pas sans risques.

Plusieurs cas sont à distinguer.

1°) La radiation résulte d’une mention d’office du greffier du Tribunal de Commerce:

La société n’est pas dissoute et peu continuer d’exercer son activité. Dans ce cas, c’est tout à fait abusivement que l’administration considère le droit éteint.

Les poursuites peuvent être diligentées normalement et la créance est éligible à une opération de rachat pour peu qu’elle satisfasse aux critères de Carnot Investissement (Créance commerciale d’un montant supérieur à 5.000 €)

2°) La radiation résulte de la clôtures des opérations de liquidation:

a) La liquidation est judiciaire:

Le droit de créance est purgé par les opérations de liquidation et hors les cas prévus à l’article L.643-11 du Code de Commerce aucune poursuite ne peut plus être exercée.

b) La liquidation est amiable:

Il est de construction purement jurisprudentielle que la clôture des opérations de liquidation amiable n’est pas opposable au créancier légitime dont la créance, connue au moment des opérations de liquidation, demeure impayée.

Le créancier aura alors le choix entre une action contre la société et une action contre le liquidateur dont la responsabilité est engagée sur le fondement de l’article L.237-12 du Code de Commerce.

Rappelons également que les associés ayant bénéficié de la distribution d’un boni de liquidation peuvent être condamnés à indemniser le créancier « oublié ».

Les créances impayées sur des sociétés liquidées irrégulièrement peuvent être cédées même si l’exercice du droit de poursuite nécessitera des débats judiciaires dont le cessionnaire ne manquera pas de tenir compte quant à la valorisation des droits .

Suppression de la Taxe de contribution pour l’aide juridique

La loi de finance 2014 votée le 19 novembre 2013 par l’assemblée nationale prévoit en son article 69 la suppression de l’article 1635 bis Q du C.G.I.

Ce faisant, le législateur accepte de ne plus faire supporter au demandeur, la taxe de 35 € destinée à contribuer à l’aide juridique. Ce texte revenait à exiger du demandeur de financer pour partie l’avocat de son adversaire.

La taxe de 150 € payée par les parties en cause d’appel est maintenue. Elle est motivée par un abondement au fond d’indemnisation des avoués.

La suppression d’une taxe est néanmoins suffisament exceptionnelle pour être soulignée. Espérons que la suite des débats parlementaires ne conduira pas le gouvernement à revenir sur cette mesure créée en 2011.

Doper les redressements judiciaires, le pot Belge.

L’homologation récente d’un plan de réorganisation judiciaire prévoyant le seul paiement de 15 % des dettes sociales sur trois ans, la première échéance intervenant 24 mois après la décision, m’a pour le moins surpris.

Cette décision émanant du Tribunal de Commerce de Bruxelles ouvre des horizons.

Il est plus facile de redresser une entreprise en la dispensant de payer ses dettes qu’en l’y contraignant.

Mais peut-on vraiment parler de redressement.

A coup sûr se pose la question des droits des créanciers. Jusqu’où est prêt à aller le législateur pour permettre à certaines entreprises de poursuivre leur activité.

La société Carnot Investissement rachète des créances commerciales impayées. Une décôte de 85 % des créances acquises n’est pas même accepté contre un paiement immédiat. Que dire d’un paiement de 5% en 2015, 2016 et 2017 !

Application de l’article L.441-6 du Code de Commerce

Depuis le 1er janvier 2013, l’article L.441-6 du Code de Commerce intègre une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en sus de la pénalité de retard.

L’application de cette disposition est à tout le moins sporadique.

Il convient de rappeler que par la publication de son arrêt du 3 mars 2009      n°07-16.527 la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a entendu affirmer:

« Les dispositions de la loi du 15 mai 2001 modifiant l’article L 441-6 du code de commerce, qui répondent à des motifs impérieux d’ordre public, sont applicables, dès la date d’entrée en vigueur de ce texte, aux contrats en cours. Les pénalités de retard prévues par ce texte pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans qu’un rappel soit nécessaire et même si elles n’ont pas été indiquées dans les conditions générales de ces contrats »

Dès lors, il doit être considéré:

1°) Qu’il n’est nul besoin que les prescriptions impératives de l’article L.441-6 du Code de Commerce figurent sur les C.G.V. pour que le Tribunal en applique la sanction,

2°) Que le texte s’applique au contrat en cours et non seulement au contrats formés depuis le 1er janvier 2013,

Au surplus, l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 € est due pour chaque facture impayée.

Passage en perte

Passage en perte à la clôture de l’exercice

A la clôture de l’exercice se pose la question du sort des créances impayées.
Rappelons que certaines créances doivent impérativement être passées en perte
Il s’agit:
Des droits qui sont éteints, (créances prescrites; créances commerciales antérieures au 31 janvier 2001)
Des débiteurs qui n’ont plus d’existence légale (liquidation judiciaire clôturée pour insuffisance d’actif.)

Ces créances même antérieurement provisionnées ne doivent plus se trouver dans les comptes, le droit n’existant plus.
Il convient de reprendre la provision et de les passer en perte.

Pour les créances dont le droit perdure, Carnot Investissement propose de les acquérir à des conditions à convenir.

Des clauses inutiles

Une bonne pratique contractuelle devrait garder les rédacteurs d’insérer dans les conventions des dispositions inutiles ou franchement contraires au droit.

L’allègement des écrits et leur meilleure lisibilité concourent à leur force et donc à la protection de celui qui a stipulé.

Pourquoi faire mention d’une clause de résolution de droit en cas d’ouverture d’une procédure collective quand cette disposition a été rendue inopposable à la procédure collective dès la loi de 67 et avec une parfaite constance dans les lois de 1985 et 2005, toutes textes d’ordre publics.

L’entreprise se croit ainsi investie d’un droit dont elle ne dispose pas !

De même voit-on quasi quotidiennement des clauses renvoyant aux « juridictions compétentes » et autres inutilités.

Autants d’apports techniques dignes de ceux de MM. Purgon & Diafoirus.

Le juge mécontent

L’activité législative n’est plus sous-tendue par la volonté d’organiser la société mais par le souci de répondre aux attentes de l’opinion.

Le législateur soucieux de sa réélection se laisse aller au dévoiement de sa fonction. Des lois hâtives viennent saper les fondements d’un édifice qui a pourtant fait ses preuves de manière positive.

Notre droit civil restait un modèle. Napoléon l’avait légué à l’Europe qui l’avait conservé quasi unanimement.

Les anciennes colonies l’avaient repris et bien au-delà.

Parmi d’autres, le principe de l’unicité du patrimoine y était consacré.

Qu’à cela ne tienne.

Pressé d’annoncer que l’entrepreneur individuel ne pourra plus être poursuivi sur ses biens propres, le parlement a créé, par la loi du 15 juin 2010, l’Entreprise Individuelle et son patrimoine affecté.

Il était pourtant devenu d’une grande simplicité de créer une EURL. Etait-il si urgent de mettre à l’abri, celui qui en est incapable ?

Les juges vont maintenant devoir faire avec les conséquences de textes contradictoires.

Et lorsque des malfaisants créeront du passif impunément, les mêmes seront sans doute accusés de laxisme.